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Les poissons les plus beaux ne sont pas les plus écolos
Les poissons les plus beaux ne sont pas les plus écolos

Les poissons les plus beaux ne sont pas les plus « écolos »

Article de Frédérique Schneider, le 06/08/2018 à 16h33 paru dans La Croix

https://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Environnement/poissons-beaux-sont-pas-ecolos-2018-08-06-1200960195?from_univers=lacroix

Les poissons tropicaux de l’océan indien les moins attractifs jouent un rôle écologique plus important que les espèces considérées comme les plus belles, selon une étude menée par des écologues du CNRS, de l’université de Montpellier, d’Andromède Océanologie et du Centre universitaire de Mayotte (1).
Explication avec Nicolas Mouquet, écologue et directeur de recherche CNRS.

Les poissons tropicaux les moins attractifs ont une richesse fonctionnelle en moyenne 33 % supérieure à celle des poissons considérés comme les plus beaux.

« La Croix » : Pourquoi ce choix original de travailler sur l’esthétique des poissons tropicaux ?

Nicolas Mouquet : Les écologues s’intéressent en effet plutôt aux caractéristiques écologiques des espèces et à leurs conditions de vie dans leur milieu naturel. Nous avons fait un choix différent, celui de travailler sur l’apparence des poissons dépendants des récifs coralliens que nous étudions à Mayotte pour ensuite faire le lien avec la protection de la biodiversité.
Ces poissons, toutes espèces confondues, vivent aujourd’hui dans des écosystèmes en danger. Leur habitat se réduit progressivement et leur survie est liée à cet environnement très particulier. Ils forment un groupe de plus de 8 000 espèces, parmi lesquelles figure l’emblématique poisson clown représenté par « Némo » dans le célèbre dessin animé.

Comment cette étude a-t-elle été réalisée ?

N. M. : Nous avons lancé un questionnaire en ligne pour mesurer la valeur esthétique des poissons tropicaux. 8 000 personnes, de 3 à 80 ans, y ont répondu. Chaque participant devait cliquer sur la photo de l’espèce qu’il trouvait la plus belle parmi des paires de 116 espèces de poissons dans l’océan Indien.
Nous avons été surpris par l’homogénéité des réponses. Nous avons découvert une « universalité » dans la perception de la beauté. Les poissons possédant des motifs et une forte hétérogénéité de couleurs ont été considérés par tous comme les plus beaux.
Les formes bizarres et l’étrangeté ont aussi été plébiscitées. Ainsi sur le podium, nous avons les chirurgiens bleus (famille des acanthuridés), les poisson-ange (Pomacanthidae) ou les poissons papillons (chaetodontidés). Alors que les chromis (Pomacentridae), une espèce plus banale, arrivent parmi les derniers.
Une fois cette hiérarchie établie, nous avons évalué le « rôle écologique » de chaque espèce dans le récif corallien en fonction de ses caractéristiques : taille, régime alimentaire, mode de vie…
Nous nous sommes alors rendu compte que les espèces les plus belles aux yeux des personnes consultées, remplissaient beaucoup moins de fonctions écologiques que les espèces peu attractives dont la richesse fonctionnelle est en moyenne 33 % supérieure.

Notre perception de la beauté du vivant peut ainsi biaiser notre perception de la diversité écologique…

N. M. : Ces résultats soulignent l’importance de l’esthétique dans notre perception de la nature, qui peut avoir des conséquences sur la protection de l’environnement. Le grand public se révèle ainsi plus sensible à la sauvegarde des animaux les plus beaux. Pourtant les photos de poissons multicolores des mers chaudes ne correspondent pas à la réalité complexe des écosystèmes dans lesquels ils vivent.
Pour protéger ces milieux naturels, il faudrait expliquer et sensibiliser sur la richesse biologique des récifs coralliens sans privilégier le beau ni le sensationnel. Cette façon différente d’aborder l’environnement est une des clés d’une meilleure protection de la biodiversité.

(1) Publiée dans Scientific Reports le 6 août 2018, elle a reçu un financement du CNRS et de la Fondation de France.

Publié le 28 mai 2019



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